Plan Ecophyto : les récoltes ne peuvent être jouées à la roulette russe
Le 19 juillet 2023 – En février dernier, au cours du Salon de l’Agriculture, les filières agricoles avaient unanimement salué les grands principes du nouveau plan Ecophyto annoncé par Elizabeth Borne. Et voilà que ce même gouvernement semble revenir à ces vieilles habitudes (et à celles des gouvernements précédents au passage) : décisions unilatérales d’interdiction de substances phytosanitaires, absence de concertation réelle avec les filières, etc. Une orientation inacceptable pour le Collectif Sauvons les fruits et légumes de France.
Ce sont de belles promesses qu’avait effectivement annoncées la Première ministre Elizabeth Borne au cours du dernier salon de l’agriculture : un « plan de développement d’alternatives pour les produits phytosanitaires les plus importants », l’identification « de nouveaux usages, de nouveaux outils et de nouveaux produits pour mieux protéger les récoltes », un « nouveau plan Ecophyto 2030 construit avec tous les acteurs impliqués » et surtout le « respect du cadre européen et rien que le cadre européen ». 5 mois après : ces belles ambitions sont-elles toujours les mêmes ? On peut en douter.
75 molécules à interdire sorties du chapeau du Ministère
Il y a d’abord cette liste de 75 molécules établie par les services du ministère de l’Agriculture et de l’alimentation dans la plus grande opacité et qui seraient menacées de retrait (on peine à trouver une quelconque justification scientifique pour beaucoup…). Parmi ces substances, de nombreux piliers de la protection phytosanitaire en fruits et légumes : (glyphosate, « composés du cuivre » etc.). Que faut-il comprendre de cette liste ? Est-ce aux filières et à leurs instituts techniques de se débrouiller seules pour trouver des alternatives à ces molécules dont la disparition est déjà programmée ? D’une philosophie de « trouvons des solutions viables avant d’interdire », nous sommes visiblement retournés au principe « interdisons et tentons de trouver des solutions après ». Comme l’ont souligné de nombreux rapports parlementaires notamment du Sénat, ce principe est pour une bonne part à l’origine de la perte par la France de sa souveraineté alimentaire.
Face aux ravageurs et maladies : les indemnisations ne nous feront pas retrouver notre souveraineté alimentaire
Le gouvernement français peut observer les exemples criants du désastre à venir avec la contamination en cours du vignoble bordelais par le mildiou ou celle des vergers de cerises par la mouche drosophila suzukii.
Si le réchauffement climatique semble être la cause principale de l’épidémie de mildiou dans de nombreux vignobles et particulièrement dans le bordelais (pluies régulières, températures élevées, absence de vent), les vignerons manquent clairement de moyens de lutte faute de substances actives supprimées. A tel point que des organisations de producteurs relayées par des parlementaires demandent que cette épidémie soit classée en « calamité agricole ». Pour faire face au développement de toutes les maladies fongiques, les agriculteurs doivent avoir à leur disposition une palette de solutions la plus large possible : variétés résistantes, produits de biocontrôle lorsque ceux-ci sont efficaces, solutions digitales et produits phytopharmaceutiques (boscalid, dithianon, captan, etc.).
Cette situation rappelle celle vécue par les producteurs de cerises français : après l’interdiction coup sur coup du diméthoate et du phosmet, ceux-ci n’ont plus aucune solution pour lutter contre la mouche drosophila suzukii. Selon certains échos médiatiques, le Ministre Marc Fesneau aurait promis d’aider les producteurs. Le Collectif Sauvons les fruits et légumes de France rappelle que ces indemnisations promises ou demandées ne peuvent relever que d’une vision à court-terme de notre agriculture. Des euros pour compenser les pertes des producteurs ne nous feront pas produire plus alors que nous importons déjà 50 % des fruits et légumes que nous consommons !
Le Collectif Sauvons les fruits et légumes de France appelle donc à revenir à l’esprit originel des annonces faites en février dernier par le gouvernement et à des décisions en cohérence totale avec les réalités de terrain.