Projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture : où est passé la compétitivité ?
Le 2 mai 2024 – Alors que la discussion parlementaire du projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture vient de débuter, le Collectif Sauvons les fruits et légumes de France souligne les nombreux manquements de ce texte qui n’a d’orientation que le nom. A commencer par le volet compétitivité qui en est complètement absent.
La version actuelle du projet de loi est issue d’une longue concertation, initiée fin 2022, qui a débouché sur une première version de texte en septembre dernier, elle-même vidée de sa substance à peine quelques semaines après. Il aura fallu la très forte mobilisation agricole de ces derniers mois pour que quelques dispositions soient rajoutées à la va-vite.
Hélas, si « l’agriculture, la pêche et l’aquaculture » sont définis à l’article 1 comme « d’intérêt général majeur en tant qu’elles garantissent la souveraineté alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux », le texte final ne répond pas que très partiellement à ces enjeux. Les producteurs de fruits et légumes, en première ligne dans le combat pour la souveraineté alimentaire, ne portent aucun espoir quant à d’éventuels effets positifs de ce texte sur leur capacité à améliorer la capacité d’auto-approvisionnement en fruits et légumes de la France ces prochaine années.
Un volet compétitivité complètement absent
Le texte qui sera examiné dans les prochains jours s’articule autour de l’orientation, la formation, la transmission et l’installation des jeunes agriculteurs, ainsi que de la « simplification de l’activité agricole ». Des objectifs très louables, mais qui n’apportent rien tant qu’on ne traite pas la compétitivité des exploitations, autrement dit l’accès aux moyens de production, et la valorisation de leurs produits auprès des consommateurs.
- Le projet ne dit rien sur les distorsions de concurrence intra-européennes d’accès aux solutions phytosanitaires et de biocontrôle :
- Alors que les premières attaques de pucerons ont lieu dans les vergers, et que le balanin de la noisette va commencer à s’attaquer aux jeunes noisettes d’ici quelques semaines, les producteurs français n’ont toujours pas accès aux mêmes solutions que leurs homologues européens. Le risque sanitaire souvent invoqué par les autorités pour ces interdictions franco-françaises n’est pas admissible tant que les fruits et légumes traités avec ces produits interdits chez nous sont libres d’entrer sur notre territoire.
- Le projet de loi est largement insuffisant pour faciliter la construction de retenues d’eau. Les épisodes de gel de ces derniers jours montrent encore une fois le caractère indispensable de la construction de ces ouvrages pour assurer aux productions la protection tant contre le gel que contre la sécheresse. La limitation des délais de recours contentieux n’est qu’une solution partielle à l’accélération des projets. Il convient surtout de limiter les temps d’instruction, ce que ne fait pas le texte.
- Le projet de loi ne remet pas en cause Ecophyto et son objectif absurde de – 50% de phytos d’ici 2030. Ecrit sur un coin de table en 2007 à l’occasion du Grenelle de l’environnement, cet objectif ne repose sur aucune base scientifique. Il constitue également une distorsion de concurrence intra-européenne de plus alors que le règlement « phytos » a été retiré par la Commission européenne suite à son rejet par le Parlement européen en novembre dernier.
- Le projet de loi ne dit rien sur l’indication de l’origine des fruits et légumes en restauration hors-foyer. Dans son acte d’achat, le consommateur prête une attention importante à l’origine des produits. En restauration hors foyer, cette indication n’est pas obligatoire. Résultat : des volumes très importants de produits importés prennent cette voie pour pénétrer nos marchés.
Si d’autres projets et/ou propositions de loi sont annoncé(e)s pour ces prochains mois sur les enjeux phytos et relations commerciales, les informations qui parviennent au Collectif Sauvons les fruits et légumes sont si contradictoires de semaine en semaine, que les producteurs ne font absolument pas confiance dans les annonces du gouvernement. Seuls des actes concrets pourront prouver la mobilisation des pouvoirs publics en faveur de notre souveraineté fruits et légumes.